mercredi 28 mars 2012

Seul un fou

Il n’y a qu’un fou pour ne pas se sentir seul,
Savoir être seul pour ne pas devenir fou.

Certains jours, tout autour est bruyant et vulgaire
Le bordel des humains, cette éternelle lutte
Les cris et le travail et tout ça dans quel but
Je voudrais me cacher, je voudrais les faire taire.

Et la nuit, le silence noir épais qui colle
Des angoisses indicibles, et la peur de mourir
Cette lourde fatigue, la peur de s’endormir.
Avoir besoin du bruit, se voir devenir folle.

Il n’y a qu’un fou pour ne pas se sentir seul,
Savoir être seul pour ne pas devenir fou.

Etre forcé d’entendre des absurdités
Se voir participer à toute la mélasse
Je me sens parcourue d’un frisson dégueulasse
Comme un papier griffé d’un crayon mal taillé.

Le corbeau va passer, l’autre oiseau reviendra
Et je vais retrouver ma fou-tue légèreté
Se forcer à sourire et savoir patienter
Et tolérer ici puisqu’un jour on s’en va.

Il n’y a qu’un fou pour ne pas se sentir seul,
Savoir être seul pour ne pas devenir fou.

samedi 17 mars 2012

Cri immobile

Au dessus de moi, dans la fenêtre horizontale
qui me permet de voir le ciel alors que je dors encore,
J'ouvre les yeux sur un milan qui passe
Qui file, immobile, dans le vent
Son cri qui fend le ciel -trop bleu- fait écho,
Et reste, en moi.
J'ai dans le ventre le cri du milan
aigu et libre tout en haut
Je suis née avec un milan dans le ventre
Celui-là ne sera jamais libre
Il me porte et se débat.
Semblable à un arbre arraché
Sur lequel on pourrait marcher.
Version craquée de la forêt,
où les hommes et le vent
se sont mis ensemble pour coucher les arbres. 

Je veux du vert je veux du bleu
Je n'obtiens qu'un rouge terreux
Mais je l'aime plus encore au creux
Les pieds dans la terre qui m'a fait naître,
Le cri dans le ventre qui me fait vivre,
La fenêtre qui donne sur le ciel.
Et le milan, qui file, immobile.  

samedi 3 mars 2012

En bas V


Comme on s’ennuie parfois
Comme rien n’a de sens
C’est pour cela qu’on travaille.
Enfin c’est ce qu’on se dit.
On travaille on paye
On rend des comptes mais pas de rencontre.
Le temps passe, nous cisaille
Chaque blessure cicatrise un peu plus mal
La solitude devient notre meilleur pote
On ne pleure plus, parfois on se force à pleurer.
Les rires grincent.
On trinque au vinaigre
Fake show
Les gens qui comptent s’éloignent
Sans en avoir l’air
On a moins souvent de bonnes raisons de s’appeler.
Parfois on y croit, c’est encore là, dix minutes, une soirée,
Et retour au vide. Vaine existence de vendu.
Viande avariée que nous sommes devenus.
Village de vermine,
Viscères pourrissantes aux dents blanches
Vile vieille ville, ne m’en veut pas.
Je suis veuve de volonté.